Julien Lizeroux :  » l’homme le plus heureux du monde d’être sur des skis »

Julien Lizeroux

Julien Lizeroux

–       Tu veux quoi pour ton anniversaire ?

–       Tu sais très bien ce que je veux…

–       Une mini cooper ?! (en rigolant)

–       Non des skis de géant pour passer mon Eurotest ! (ndlr : test de ski dans le cursus du monitorat de ski)

 Une minute de silence

–       Tu sais quoi ? Si je gagne une coupe du monde, je t’offre une mini !

 Le pari était lancé…. Quelques semaines plus tard, Julien Lizeroux remportait sa première coupe du monde sur la piste de Kitzbuhel, en Autriche. Marion Lizeroux, sa petite sœur, se rappelle de ce jour si particulier : « toute la famille était sur place…sauf moi ». L’ironie du sort fait qu’elle était justement en train de passer son Eurotest ( ! ) « Après sa victoire, se souvient Marion, il était injoignable. La remise des prix terminée, il m’a téléphoné. La première chose qu’il m’a dite c’est : tu as gagné une voiture ! ».

Voilà comment Marion s’est retrouvée avec une Mini Cooper rouge, symbole d’un des traits de caractère de ce grand frère, avide de défis. « Il fait beaucoup de paris, raconte Marion. C’est un grand joueur, surtout avec ses copains. Il a toujours aimé plaisanter ». Plaisanter mais aussi donner et partager. « Il adore faire des cadeaux. Ce sont souvent des cadeaux de valeur sentimentale. C’est sa façon à lui de donner de l’amour. Quand il part en compétition, il ramène toujours pleins de choses : pour nous, pour ses amis ou pour les enfants de ses amis. »

Derrière ce grand frère généreux, se cache un petit caractère. « Dans la vie, il est parfois chiant ! Il veux souvent avoir raison, avoue Marion. Il a du mal à accepter que l’on ait pas le même avis que lui ». Un défaut qui s’estompe avec le temps, comme le souligne sa petite sœur. « Sa vie d’athlète l’a calmé. Ça lui a apporté beaucoup. Je le trouve de plus en plus ouvert et à l’écoute d’autres opinions. »

Car le parcours de Julien a été semé d’embûches. Marion décrit son parcours sportif comme « périlleux ». « Toute sa carrière a été basée sur la persévérance. Ca a été long et difficile, témoigne-t-elle. Les premiers gros résultats sont arrivés tard. Tous ses efforts ont fini par payer, à la longue. »

Julien Lizeroux et sa soeur Marion

Julien Lizeroux et sa soeur Marion

Pour Marion, le déclic sur le plan sportif a été lié à une épreuve que la vie leur a imposée. En 2008, leur grand frère, Yoann, perdait la vie dans un accident de base jump. « Après le décès de Yo, je me suis dit : il va tout exploser, confie Marion. Il avait tellement envie. Ca lui a donné une force énorme. Dans sa tête, il était devenu invincible. C’est le moyen qu’il avait trouvé pour exprimer sa tristesse et le sentiment d’injustice qu’il ressentait. Un jour mon cousin lui a demandé à quoi il pensait quand il était dans la cabane de départ. Il lui a dit qu’il faisait le vide, qu’il ne pensait à rien. Après l’accident, il a dit : « maintenant je sais à qui je vais penser » »

Ce qui ne tue pas, rend plus fort. « C’est sa devise, notre devise, ajoute Marion. Mon père nous a élevé comme ça. » Julien enchaîne les victoires, les podiums, les résultats pendant plus de deux saisons. Il fait parti des meilleurs slalomeurs mondiaux, tout lui sourit. C’était sans compter sur une vilaine douleur au genou qui se fait de plus en plus insistante. « Il avait mal. Les médecins disaient qu’il n’avait rien. Il a continué à skier jusqu’à ce que la douleur soit si intense qu’il ne puisse plus poser le pied par terre. C’était difficile car il ne savait pas où il allait ni pourquoi il avait si mal. Malgré tout, il ne s’est jamais plains, témoigne sa sœur. Jamais de ma vie, je ne l’ai entendu s’apitoyer sur son sort. Il est très solide dans sa tête. Quand les médecins ont su ce qu’il avait, ils lui ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire. A force d’abnégation, il a fini par trouver un chirurgien qui était d’accord pour l’opérer. Il lui a dit : «  je t’opère pour que tu puisses remarcher et monter les escaliers sans avoir mal. Pour que tu es une vie normale. » »

La vie « normale » de Julien, elle, est sur les skis. Après trois ans d’absences, il fait son retour sur le circuit Coupe du Monde, en novembre dernier…et réussi à décrocher son ticket pour Sotchi ! « Il est heureux, souligne Marion. Cette blessure qui l’a handicapée pendant trois ans, l’a métamorphosé. Il est tellement heureux d’être remonté sur les skis ! Il le prend comme une deuxième vie, une seconde chance. Il a réussi à transformer la pression en plaisir. Il ski, il est dans son monde, il est heureux….et nous aussi ! »

« L’homme le plus heureux du monde d’être sur des skis » prendra le départ des Jeux Olympiques pour la deuxième fois avec, comme toujours, le sourire au bord des lèvres.

Méryll Boulangeat

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