Cachée derrière de grosses jumelles, elle regarde la montagne. Elle scrute chaque caillou, décrypte chaque pente, analyse la composition de la neige. Elle ? C’est Illona. Une jeune fille de 16 ans dont le prénom à des airs de fée Clochette. Sa vie n’a rien d’un conte de fée mais elle s’en rapproche. Son truc ? Le ski freeride. Explications : l’exercice consiste à descendre, skis aux pieds, des montagnes raides, enneigées et quasiment vierges de toutes traces le plus vite et le plus esthétiquement possible. Pour que la recette soit parfaite, ajoutez-y quelques sauts de barres rocheuses ! L’exercice requiert un certain sens de l’engagement, les consequences d’une chute ou d’une sortie de piste pouvant être très graves. Même si l’amour du risque est très présent, les compétiteurs ne se jettent pas tête baissée dans la pente qui les attire. Ils sont avant tout entraînés et expérimentés.

Les représentants français lors des championnats du monde junior de freeride. Bilan : 4 médailles pour le clan tricolore.
CP/MB
Le week-end dernier, les championnats du monde junior de ski freeride (FJWC) avaient lieu en Andorre. L’occasion pour les meilleurs riders juniors de la planète de se confronter sur le Pic Alt de Cubil. La montagne pyrénéenne culmine à 2833 mètres d’altitude. Une compétition particulière pour Illona Carlod qui remettait son titre de championne du monde junior en jeu. Mais avant de glisser sur la montagne, il faut l’analyser. Interdite d’accès avant la compétition, le seul contact que les riders entretiennent avec elle est visuel. Entre le bas de la pente et le sommet de la montagne, les repères changent. Les rochers paraissent plus gros, la neige plus dure. Le skieur se sent soudain tout petit. Il peut alors se perdre et ne plus retrouver la ligne qu’il avait décidé d’emprunter. “ Quand tu te retrouves au depart, ce n’est plus la même chose que dans l’aire d’arrivée, se souvient Seb Michaud, entraîneur d’Illona et ancien freerider professionnel. Un petit caillou visible depuis le bas peut être recouvert de neige une fois que l’on est au-dessus. Il faut trouver d’autres repères comme des bouts de sapin qui dépassent, des congères ou des zones d’ombres.”
D’où l’importance de passer du temps face à la montagne. Un inlassable tête à tête qui peut durer des heures. « On reste une heure ou deux en bas de la face, explique Illona. On prend aussi des photos pour zoomer et la regarder le soir « . C’est donc face à celle-ci, jumelles aux poings, que les 60 jeunes skieurs et snowboarders qualifiés préparent leur competition. Pendant deux jours, la face perd de sa pudeur et se met à nue devant ce jeune public passionné de glisse extrême.
Au pied de la face, sur le télésiège, au restaurant, sous la douche, dans le lit, la montagne du Pic Alt de Cubil ne quitte pas les pensées de la skieuse de La Clusaz. “ J’y pense souvent. Il m’arrive même d’en rêver la nuit”. Elle est omniprésente telle une ombre qui lui souffle et lui remémore les endroits où elle passera. Illona prévoit deux ou trois options de lignes : “ En fonction des conditions du jour et de ce que font mes concurrentes, j’envisage plusieurs choix. La notion d’originalité est importante pour les juges, il faut essayer de les surprendre en skiant des lignes différentes des autres filles. Je connais toutes mes options par coeur. Je fais de le visualisation pour me souvenir des repères qu’il y a dans la face. ”
Après deux jours et deux nuits totalement focalisés sur la montagne andorrane, les riders sont plus que jamais prêts à la dévaler, à en savourer, sous leurs planches, chaque instant. Illona s’élance en quête des repères qu’elle s’est maintes fois visualisés. Virage après virage, le réel remplace désormais l’imaginaire. Sur le chemin, il y a quelques surprises, comme la qualité du manteau neigeux et les rochers camouflés par le peu de neige tombée cette année, mais dans l’ensemble tout se passe pour le mieux. Dans l’aire d’arrivée, le verdict tombe : Malgré une ligne fluide et maîtrisée, composée de trois sauts, Illona est, ce jour-là, tombée sur plus forte qu’elle. Elle ne sera pas championne du monde junior pour la deuxième fois. Cette année, à la Clusaz, c’est la médaille de bronze qu’elle ramènera (le titre revient à l’Américaine Jacqueline Pollard devant la Norvégienne Synnove Medhus, ndlr). “Le niveau était très élevé, nous étions nombreuses. Je suis quand même fière de cette troisième place bien que j’aurais souhaité garder mon titre. Maintenant, d’autres compétitions m’attendent comme la dernière étape du Freeride Junior Tour by Dakine à Verbier où j’ai hâte d’être. » D’autres compétitions, d’autres montagnes à explorer et toujours le même sourire dans la ligne d’arrivée : celui d’Illona Carlod qui n’a pas fini de vivre son conte de fée.
Méryll Boulangeat @Meryll_B
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Le podium !
Mora Banc Freeride Junior World Championships 2015 Grandvalira-Andorra – http://www.freeridejuniortour.com
Bonjour Merrill
Je suis le papa de Illona.
Félicitations pour ce superbe reportage qui est écrit admirablement et extrêmement réaliste.
Nous avons vécu un très grand moment avec vous et espérons en revivres le plus rapidement possible.
La bise.
Jérôme CARLOD
Tel 0620226000