Après un mois d’entraînement sur les terres américaines, Annabel Merlier a participé à ses premiers Championnats du monde de Jujitsu Brésilien. Déjà sacrée aux derniers Championnats d’Europe, elle a remporté en Californie, le week-end dernier, le titre ultime, celui qui habitait ses espoirs les plus profonds. À 30 ans, Annabel est allée au bout de son rêve. Elle raconte sa journée, ses sensations, ses émotions et évoque le futur. Plus que jamais, elle arbore fièrement ce tatouage, symbole de l’aventure qui l’a conduite sur la plus haute marche du podium, sur lequel est inscrit : « Live your dreams » (Vis tes rêves, ndlr).
« Ça y est je suis Championne du monde! Après cette longue et difficile préparation j’ai obtenu la meilleure des récompenses ! Je suis tellement heureuse d’avoir décroché cette médaille tant désirée ! Je suis encore toute euphorique, et ce n’est que le début. Je rentre vendredi (le 7 novembre, ndlr) en France et je suis très impatiente de pouvoir fêter ça, d’abord avec mon chéri, puis avec les personnes de mon club, puis sur mon lieu de travail et enfin dans le nord avec ma famille ! Ma journée a commencé tôt. J’ai été matinale pour prendre le temps de m’attacher les cheveux et préparer mon sac. Dans la voiture, écouteurs sur les oreilles, je me concentre, je pense à la compétition. Une fois sur place, je vais me faire peser. Je suis dans la catégorie ceinture bleue, on l’appelle aussi la catégorie feather, pour faire simple, cela veut dire moins de 58,5 kg en kimono. Après la pesée, je peux grignoter quelque chose avant le premier combat.
Leticia Ribeiro, ma prof américaine n’a pas pu venir. Maxine, une des filles avec qui je me suis entraînée, l’a remplacée. J’avais aussi un précieux soutien depuis la France. Par téléphone, Julien, mon coach et compagnon dans la vie, a été très présent. J’avais la chance de pouvoir écouter ses conseils avisés avant et après chaque combat. Sur place, Maxine a pris son rôle très au sérieux. Quand je l’ai vu arriver, la pression est montée d’un cran. Je savais que l’heure du premier combat était arrivée. Enfin, j’étais là. Prête à monter sur ce tatami mondial, celui dont j’avais tant rêvé, pour lequel je me suis tant entraînée. Le premier combat est le plus difficile car éliminatoire. J’étais très tendue. Je ne voulais pas repartir les mains vides après quelques minutes de compétition seulement. Il faut assurer dès le début. Etre prête psychologiquement dès les premières secondes et bien échauffée. J’étais confiante mais attentive. On ne sait jamais ce que cachent les adversaires. Les apparences peuvent être trompeuse donc il faut rester concentrée quoiqu’il arrive. Il y a beaucoup de bruit, la salle est immense et remplie. L’ambiance est incroyable. Je ressens des ondes positives. Le bruit et les cris m’aident à entrer dans la compétition et me transportent. Je gagne mon premier combat 13 à 0 et le 2ème, qualificatif pour la finale, 10 à 0. La médaille est assurée. À moi d’en déterminer la couleur. Je sais que la fille en face est très puissance et qu’elle a la rage. L’année dernière elle était déjà montée sur le podium. C’est une cliente sérieuse qui n’est pas la par hasard. Je reste lucide et je me dis que je ne suis pas là par hasard non plus. Julien et Maxine me le rappellent aussi. Je suis prête. L’or est à ma portée. J’oublie tout, la fatigue, la douleur et me prépare à faire mon dernier combat de ces Championnats du monde. Le duel est intense. Jusqu’à la dernière seconde, tout peut basculer.
Nous avons terminé sur le score de quatre partout mais j’ai marqué un avantage qui m’a donné la victoire. Quand le temps de combat s’est écoulé, avant même que les juges annoncent ma victoire, des larmes ont commencé monter. J’ai eu envie de hurler et je l’ai fait! Je suis tombée dans les bras de Maxine et de ma famille américaine. J’ai pleuré. Un sentiment de liberté m’a traversé, toute la pression de ces derniers mois est retombée, laissant place à un autre sentiment : celui de la fierté du travail accomplie.
J’ai profité du podium. Sur la plus haute marche, je me suis refait le film de tous les moments passés pour en arriver là. Je suis fière du travail que j’ai réalisé avec Julien. C’est vraiment la plus belle et la plus difficile compétition que j’ai faite jusque-là. Une expérience incroyable que je n’aurais jamais pu réaliser sans le soutien de mes proches, mes amis et ma famille américaine. Sans eux, je n’y serais pas arrivée.
Cette victoire me donne envie d’aller encore plus haut et encore plus loin. A mon retour en France je vais recevoir la ceinture violette. Il faudra tout recommencer mais un cran au-dessus. On se prépare déjà pour les Championnats d’Europe de Lisbonne, fin janvier. J’aimerai y décrocher un titre. Je rêve des plus beaux titres et des plus belles médailles avec toutes les ceintures. La seule petite différence est qu’à l’avenir, Julien sera aussi du voyage. Ensemble, nous reviendrons surement au sein de l’équipe de Leticia Ribeiro mais le projet ultime reste de pouvoir combattre sous les couleurs de la Team Prana, notre chère équipe Française de Sète. »
Propos recueillis par Méryll Boulangeat @Meryll_B