
Rodger Federer et son sparring partner du jour, Jules Marie. CP/Tennis Magazine
Sur le bord de l’imposant court central de l’O2 Arena de Londres, les yeux attirés par les joueurs de tennis qui s’entraînent, Jules Marie, raquette à la main, observe. L’œil attentif, il décrypte les gestes des joueurs, le son du cordage de leurs raquettes. Ici, au Master de tennis de Londres, seuls les meilleurs tennismen de la planète sont conviés. Les huit premiers du classement ATP (circuit professionnel international) en simple et les huit meilleures équipes en double. L’Elite de la discipline, la crème du tennis mondial…et Jules Marie. Le Français est classé 260ème mondial. Pourtant pendant une semaine, il foulera, comme ses idoles, la surface abrasive de l’O2 Arena. Jules Marie a été choisi pour être le « sparring partner » des joueurs qualifiés pour cette finale de haut vol. Le sparring partner, ou partenaire d’entraînement, est indispensable aux joueurs de tennis. Pour se préparer et travailler des éléments techniques, ils ont besoin d’un bon joueur face à eux. Un joueur qui maîtrise le sport, ses codes et ses subtilités. Pas besoin d’être dans le top du classement pour être un sparring partner, il suffit de faire ce que le champion demande.

Jules Marie. CP/Tennis Magazine
« On the Road » : sur la trace des champions
A 23 ans, Jules Marie découvre ce rôle pour la première fois à Londres. Il a été choisit parmi plus de 200 jeunes candidats prétendants au poste. Tous sont sponsorisés par la marque Tecnifibre et bénéficient depuis deux ans du programme « On the road ». À travers ce programme les jeunes talents sont accompagnés avec l’objectif d’atteindre les plus hautes marches des podiums. Dans ce cadre, en partenariat avec l’ATP, Tecnifibre a mis à disposition de l’organisation du Master de Londres les sparring partner, dont Jules Marie. Guillaume Ducreut est le team manager de cette équipe de champions en devenir. C’est lui qui a sélectionné les deux sparring partner de l’édition 2014 : « Il faut avoir un bon niveau de jeu mais ce n’est pas la seule condition. Être sparring partner, c’est être au service d’un joueur. Tout le monde n’en est pas capable. J’ai choisi des personnalités respectueuses et disciplinées. Le dernier critère pour être retenu, c’est l’attachement à la marque. À travers ce team, j’essaie de rassembler les joueurs sur des valeurs communes. Pour nous l’esprit d’équipe est très important. »

Jules Marie pendant un entraînement sur le central. CP/Méryll_B
« Federer était très relâché, assez déconneur »
Pour Jules, faire partie de l’aventure est « une chance unique ». Ainsi, il côtoie les joueurs dont il s’inspire au quotidien. Son premier entraînement sur les courts anglais, Jules l’a fait en compagnie du joueur Japonais, Kei Nishikori, 5ème mondial. « Au début je me suis posé des questions, j’avais peur de ne pas arriver à jouer. En plus, avec les balles neuves et le terrain abrasif, les effets étaient différents de ce dont j’avais l’habitude. J’avais les jambes et les bras un peu raides. Il y avait plus de public pour cet entraînement que lorsque je joue un match. Au fur et à mesure du jeu, je me suis décrispé. »

Jules Marie avec le Japonnais, Kei Nishikorii sous le regard de son entraîneur, Michael Chang, et le public massé devant le court. CP/Méryll_B
De ces balles échangées avec les meilleurs, Jules se souviendra de son entraînement avec Stanislas Wawrinka. « J’étais à 200% tout au long de l’entraînement. Nous avons joué pendant près d’une heure, j’étais super concentré. On a fait quelques points, j’ai plutôt bien joué, j’ai même gagné 11-3 », souriait le jeune joueur de Caen à l’issue de la rencontre.

Jules Marie et Stan Wawrinka après un entraînement. CP/Tennis Magazine.
Pour Jules Marie, chaque joueur est différent et chaque entraînement lui apporte son lot de satisfaction. Ainsi, après ces moments d’intimités partagés, pour Jules Marie, le numéro 1 n’est autre que le très populaire Rodger Federer : « Pendant la séance, il était très relâché, assez déconneur. Il n’était pas à 100% pendant tout l’entraînement. Mais quand il a décidé d’élever le niveau de jeu, j’ai senti une grosse différence. Notamment sur son coup droit. La vitesse était impressionnante. J’avais parfois des difficultés pour voir où partait la balle. À la fin de l’entraînement, j’ai pu discuter avec lui, il était très ouvert, souriant et à l’écoute.»
Une fois sur le terrain, Jules s’exécute en fonction des demandes des joueurs. Tous les matins, il arrive à 8h30. Bien qu’on lui donne un programme la veille, il peut-être appelé à n’importe quel moment de la journée en fonction des exigences des joueurs. Quand il n’est pas sur le court, il attend, téléphone à la main, qu’un joueur ait besoin de ses services. Vers 16h30, l’attente prend fin. Il sait qu’à partir de cette heure-ci, il ne sera plus sollicité jusqu’au lendemain. Alors il savoure, avec envie, les matchs qui opposent les meilleurs protagonistes du moment.

Jules Marie après un entraînement sur le court central de l’O2 Arena de Londres. CP/Méryll_B

Son rôle de sparring partner fait de Jules Marie l’objet de sollicitations médiatiques. CP/Méryll_B
Jules profite au maximum de l’expérience pour enrichir son jeu. « Sur le court, je regarde ce qu’ils font, comment ils utilisent les zones du terrain, comment ils agressent, comment ils s’entraînent. » Pourtant, pour lui, c’est hors du terrain que l’aventure prend tout son sens : « C’est super intéressant de les voir vivre en dehors du court. Je regarde ce qu’ils mangent, comment ils s’entraînent à la salle de gym, leurs protocoles avant les matchs et la veille des compétitions. » Aux premières loges, des petites étoiles dans les yeux, Jules rêve de gloire et de victoire. Aujourd’hui, il immortalise par des photos chaque entraînement. « Juste dire que j’ai tapé la balle avec eux, c’est énorme ». Demain, il espère à son tour, à l’image des Djokovic, Federer et autre Wawrinka, faire partie des meilleurs joueur du monde et d’avoir, ainsi, besoin d’un jeune sparring partner.
Méryll Boulangeat @Meryll_B
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