Ils étaient quatre français au départ du Skicross des Jeux Olympiques de Sotchi. Trois d’entres eux ont terminé sur le podium. Jonas Devouassoux, le quatrième de la bande, a pris la dixième place de l’épreuve. C’est depuis l’aire d’arrivée qu’il a assisté au sacre de ses trois copains. Pour Jonas, les sentiments s’entrechoquent : « un triplé français, aux Jeux olympiques, c’est magnifique ! J’ai vécu un moment de sport historique. Mais pour moi, c’est difficile, confie Jonas, car je ne fais pas vraiment partie de cet exploit ».

Jonas Devouassoux devant les anneaux olympiques à Sotchi
Le soir venu, alors que l’ambiance est à la fête dans le clan Français, Jonas préfère rejoindre sa chambre. « Je n’avais pas envie de plomber l’ambiance. Je n’étais pas dans le même délire que les autres. Eux étaient dans l’euphorie alors que moi j’étais déçu. J’avais besoin de m’isoler, confie le skieur. Ce n’est pas que je n’avais pas envie de fêter leur réussite, nous le ferons d’ailleurs sûrement tous ensemble une fois la saison terminée, mais j’avais besoin d’être seul. A ce moment-là, il me fallait du temps pour digérer ma déception personnelle. J’étais au fond du gouffre ».
Sa chambre, il la partage avec le tout nouveau champion olympique, son camarade d’entrainement, Jean-Frédéric Chapuis. « Après la course, nos rythmes étaient décalés. Quand il rentrait se coucher, moi je me levais. Cela ne me dérangeait pas, ça fait partie du truc. »
Isolé par choix, dans sa « bulle », le skieur de Chamonix, prend le temps de réfléchir : « j’ai pensé à ce qui avait marché et ce qui n’avait pas fonctionné sur les quatre dernières années. J’ai fait un bilan pour pouvoir faire partie du triplé la prochaine fois ! ».
En plein contre-jour de cette toute nouvelle lumière qui éblouit le skicross français, Jonas se rend invisible aux yeux des autres. Il se fait discret, digère, cogite. Ses trois copains, au centre de toutes les attentions, sont touchés par la situation du Haut-Savoyard : « tous sont venus me voir. Nous avons discuté, ils m’ont réconforté. Ils comprennent parfaitement la situation dans laquelle je me trouve ».
Une déception, un échec qui ne laisse pas à Jonas qu’un goût amer, bien au contraire : « Je suis très content pour mes potes et pour le sport. Cela va permettre de faire connaître le skicross au grand public. Et puis, même si ce n’est pas évident pour moi, admet-t-il, c’est hyper stimulant de se dire que je fais partie de cette équipe et de m’entraîner avec les meilleurs. »
Une fois en France, alors qu’un tourbillon médiatique aspire les trois médaillés, Jonas quitte les montagnes pour retrouver sa copine à Dijon. « J’avais besoin de couper du ski, de la montagne, de tout le monde…Et aujourd’hui encore d’ailleurs », confie-t-il. Il a fait l’impasse sur la première Coupe du Monde qui a suivi les Jeux. Un peu trop tôt, un peu trop fatigué émotionnellement : « après les jeux, c’est difficile de repartir. On se prend un coup de barre émotionnel. On se relâche, c’est la fin d’un cycle de quatre ans. Même pour les médaillés et les entraîneurs ce n’est pas évident ».
Quand on demande à Jonas ce qui a été le plus difficile pendant ces jeux, il répond sans hésiter : « c’est un rêve de gosse qui s’est effondré »… Avant de poursuivre : «…en partie, car ce n’est pas fini. Il y aura d’autres occasions à venir ! ».
Méryll Boulangeat

Enak Gavaggio (précurseur du skicross en France) et Jonas au village olympique